30.3.06

Fatale attraction.

De toute façon, c'était même pas la peine de poser la question : vu l'état de ses finances, le cirque Zordano courait droit à la faillite. Le personnel était payé au lance-pierres, les animaux nourris un jour sur deux, et je vous raconte pas comment ça sentait le fauve dans la ménagerie. Alors, le boss du barnum, un éléphant cynique et mégalo nommé Dumbo, réunit tout son monde et lui tint à peu près ce langage : « Ecoutez-moi bien, bande de trompettes. Si d'ici une semaine, quinze jours à tout casser, vous ne me dégottez pas une attraction qui fasse revenir le public… Je mets la clef sous la porte ! Et alors, vous pourrez dire adieu à la Piste aux Etoiles ! ». A ces mots, tous les animaux présents se mirent à protester : les lions rugirent, les chevaux hennirent, même les lamas crachèrent. Dans ce brouhaha, une voix se fit néanmoins entendre. « J'ai une idée ! s’écria Sheeta, la jolie gueunon. Je vais plonger dans un dé à coudre du haut d'un baobab ! ». « Oui, c’est ça ! pouffa Dumbo. Et on viendra te ramasser à la petite cuillère ! ». Comme on pouvait s’y attendre, tous les médias se déchaînèrent. Après le passage de Sheeta au journal de Béatrice Borloo, où elle confirma que, sous huitaine, elle ferait le grand saut, le cirque ne désemplissait plus – et Dumbo, pachyderme plutôt caustique d'ordinaire, ne se tenait plus de joie. « Youpie ! » barrissait-il, en recomptant chaque soir la recette dans sa guérite. Enfin le grand jour arriva. Juste avant le coucher du soleil, une parade géante déroula ses flonflons dans la ville, invitant la population à venir admirer le numéro. Suspendue par un harnais au cou de Sophie la girafe, Sheeta atteignit la cîme de l'immense baobab, prit place sur le plongeoir et regarda la foule. C'était très impressionnant : les gens comme des fourmis, le dé à coudre parfaitement invisible. Puis, respirant un bon coup, elle prit son élan, courut de toute la force de ses petits pieds agiles jusqu'à l'extrémité de la planche, se jeta sans hésiter dans le vide… et c'est alors que la sirène du réveil s'est déclenchée et que je me suis étalée comme une bouse en tombant de mon baobab lit.

(Ma participation au Jeu #24 d'Ecrire et Illustrer. Photo X).

9 PETIT(S) COMPRIMÉ(S):

Anonymous Anonyme a écrit...

Je viens d'avoir une vision "Anitta-isée" de la Sophie la Girafe de mon enfance et j'ai du mal à m'en remettre !!

Pauv' Cro-Mignonne qui ne comprendra jamais pourquoi je vais hurler de rire devant la sienne... :-D

30/3/06 10:47 AM  
Anonymous Anonyme a écrit...

ça fait de bien de rire un peu, même si pour cela tu dois en tomber de ton lit. Merci :-)

30/3/06 12:27 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

La chute est renversante...

30/3/06 12:47 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Tu m'as fait découvrir un très joli site d'écriture, je ne dis pas que...
Et dis-moi, tu nous racontes des histoires, dis, avec les deux autres petits singes (celui qui se bouche les oreilles et celui qui a ses mains devant la bouche). S'te plaît, Anitta !....

30/3/06 6:23 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Ma mère, qui ne m'a jamais emmené assister à un spectacle de cirque, disait toujours une fois que nous étions installés dans les gradins de mes rêves : "Métaphore mon chéri, sinon tu auras froid aux yeux!"

Voilà un texte cousu main ciselé par votre subtil imaginaire de ..... iste ; )

Bye, bye petite main fraternelle !

30/3/06 10:30 PM  
Blogger tirui a écrit...

sauter dans un dé à coudre du haut d'un baobab c'était un boulot pour anitta croft, ça plutot
enfin si elle préfère sauter de son lit, c'est son droit (et elle a aperçu des choses sous son lit au passage ?)

30/3/06 10:54 PM  
Blogger Ally a écrit...

Aïe ! ca fait mal de tomber du lit !

J'aime bien le "Beatrice Borloo"... ;o)

31/3/06 1:32 AM  
Blogger Claire IWirth a écrit...

Quand on tombe c'est le moment où on touche terre qu'on a la vie sauve.

31/3/06 9:58 AM  
Anonymous Anonyme a écrit...

une jolie femme qui tombe de son lit, voilà aussi une attraction qui peut faire salle comble !

1/4/06 10:48 PM  

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