24.9.05

En route pour la joie.

Voilà, j'arrive à peu près au terme des deux années que Christine a passées parmi nous. Bon, j'ignore si je vous ai assez dit combien ces deux ans furent bouleversants à tous égards, pour Louloute, Franck et moi : je ne sais pas – imaginez un incident nucléaire de niveau cinq, un feu d'artifice en novembre, Pierre Bourdieu à la télévision… Mais comme même les meilleures choses ont une fin, pour conclure cette période il me faut vous parler d'Eric, le drôle d'asticot qui allait devenir, à l'issue de péripéties que je ne vous dirai pas, le père de son enfant.

Ahaaa, Eric.

Lui, la première fois que je l’ai vu, j’ai tout de suite su que c’était le bon. Il faut dire que je n'ai aucun mérite : devant elle, il était si… whouyouyou ! Et devant lui, elle était si… whouyouyou ! Et quand ils étaient ensemble, c’était si… whouyouyou ! J'étais tellement émue, tellement heureuse aussi de les voir se tenir par la main, tout malhabiles et gênés devant moi qu'ils étaient, que j'en perdais mon latin.

Bah, c'est ainsi : je suis une grande sentimentale, et ce n'est pas à mon âge que je vais me refaire, n'est-ce pas ? Que voulez-vous, même le bonheur des autres me comble ; c'est vous dire. A l'école, lorsqu'une de mes bonnes amies me quittait pour aller s'acoquiner avec une autre, plus belle, plus riche ou plus branchée que moi, je n'arrivais même pas à lui en vouloir. Quoi, t'es mieux avec elle qu'avec moi ? Eh ben restes-y, va. Avec moi c'était fichu d'avance, de toute façon. Et tu peux bien me narguer, lui faire des mamours et des papouilles à n'en plus finir, et lui échanger nos secrets, tiens. Moi je continuerai à t'aimer… dans le silence et dans les larmes.

Comme dirait l’autre, ça n’a pas fait un pli. Dès leur première date, ma sœur a clos à jamais son cœur d’artichaud, et elle s’est mise à songer sérieusement à la douceur d’un foyer. Sonnez trompettes, résonnez tambours : de retour d'Auckland, notre troubadour des rues liquidait ses affaires ici-bas et partait vivre à Amsterdam : ma sœur l’a suivi là-bas sans demander qu’on reste. Ha ha !

Voilà : cette fois j'ai fini.

Whouyouyou !

Oui, je sais.

Je sais qu'on me reprochera d'avoir choisi, dans ces deux ans, les faits les plus illustres, quitte à parfois faire passer ma sœur pour une psychopathe sympathique, et gardé sous silence des moments moins drôles ; en quelque sorte, d'avoir mis le soft et le fun, et ôté le hard et le gore ; que le résultat soit plutôt space, je veux bien l'admettre. Mais je ne pouvais pas vous déballer mes souvenirs comme des papillottes et vous laisser les trier comme un vieux tas de cartes postales, non mais ho !

Je l'avoue : j'ai donné quelques coups de ciseaux. Je vous ai caché des choses. Je ne vous ai pas tout dit.

Le poids des convenances, une certaine forme d'autocensure, une certaine prudence aussi. Oui, euh… Surtout la prudence.


Soyons claire : ne comptez pas sur moi, par exemple, pour vous narrer comment Ernestine Gibolin s'est faite rentrer dans le lard par ma sœur. Je vous connais : vous seriez tentés d'en déduire des choses pas très catholiques sur son compte, alors qu'il ne fallait vraiment pas être une buse pour deviner qu'avec Christine, notre chère voisine allait se manger une porte un jour ou l'autre – c'est peu dire que nos craintes ne furent pas déçues !

Pareil, j'aurais pu aussi vous raconter la fois où elle s'est piquée de conduire une moto. Par un hasard malencontreux, son choix s'est porté sur celle de Thierry ; dans des circonstances qu'il serait trop long de relater, elle a emmené Louloute avec elle. Mais passons : là encore, vous vous feriez du mauvais sang. Tout ça pour queu t'chi, même pas la plus petite égratignure ! Bon par contre, la moto… et Thierry… Bref.

Ou encore – là c'était drôle – quand complètement saoule elle s'est enfermée dans les toilettes d'un restaurant, et a refusé d'en sortir malgré mes coups contre la porte ; moralité, j'ai ameuté toute la clientèle de l'établissement, alors qu'il eût beaucoup mieux valu qu'on reste très discrètes, toutes les deux, ce soir-là…

Mais bon.

De toute façon peu importe. Si vous m'y poussez expressément, je peux vous dire que l'étincelle qui fit déborder le vase et réaliser qu'il était temps que notre cohabitation s'arrête, ce n'est pas cette algarade avec Mme Gibolin, pas plus que cet incident de moto, ou cette histoire de toilettes. Ce qui a entraîné le début de la fin, si j'ose dire, c'est cette soirée où Christine nous a conduits, Franck, Louloute et moi, dans cet endroit tenu par quelques-unes des plus éminentes figures de la criminalité organisée d'outre-Quiévrain. Ouaf, la nuit de oufs !

Mais c'est sûr : cette nuit-là, je ne peux pas vous la raconter.

Voyez-vous, en dépit des apparences je ne suis pas sotte, enfin : pas totalement, disons. Certes, on peut se moquer de mes allures de godiche et de mes colères à l'emporte-pièces, mais dites-vous bien que je n'ai AUCUNE envie de parcourir ma ville en voiture – ligotée au fond du coffre…!

Pas plus, d'ailleurs, que je ne tiens à me faire épiler les jambes au béton pré-contraint, une de ces nuits prochaines dans les eaux du port. Tout le monde vous le dira : en cette saison, l'eau du port est BEAUCOUP trop froide…!

Sachez-le, il y a des noms qui ne peuvent pas être prononcés. Des destinations qui doivent être oubliées. Des phrases qui ne doivent pas être écrites : est-ce à vous que j'apprendrai qu'un accident est si vite arrivé, de nos jours ? D'autant que ce n'est pas pour rien, et là croyez-le je sais de quoi je parle, qu'on dit que la mafia d'outre-Quiévrain est la plus terrible de toutes les mafias.

Non, vraiment, n'insistez pas : je ne vous dirai rien.

Et puis, tout ceci pourrait nuire à la réputation de ma famille, vous saisissez ? J'aurais beau vous jurer mes grands yeux qu'on n'a rien fait d'illégal, vous imaginez, vous, le scandale, les gros titres dans les journaux ? Eh, ça vous plairait, vous, de voir débarquer Claire Chazal dans votre salle à manger ?
– Patrick, vous me recevez ? Oui, je suis en direct de cette maison où, comme vous savez, la police interroge actuellement l'homme qui a tenté d'étrangler sa belle-sœur, ainsi que la mère indigne qui a abandonné sa fille dans un…

Ah j'te jure, la te-hon sur la mill'fa !

Non, décidément, je ne peux pas vous raconter cette nuit-là.

En plus, ça donnerait une tonalité un peu trop noire à ces pages, alors que jusqu'à présent elles respirent plutôt la joie de vivre, vous ne trouvez pas ?

Et puis surtout… Tout le monde s’en fout, non ? Plus vite j'en aurai terminé, mieux ce sera pour tout le monde, pas vrai ?

Non ? Pas pour vous ?

Pardon ? Vous insistez ?

Bon, d’accord. Je vais tout vous dire.

Mais je vous préviens : ça risque d'être long…

Vous avez de quoi noter, monsieur le Commissaire ?




(photos X)

9 PETIT(S) COMPRIMÉ(S):

Blogger tirui a écrit...

à ta place je me méfierais, les anonymes là au-dessus, ça sent sa mafia américaine à plein nez !
et ne tourne pas le dos à la fenêtre quand tu blogues.
on ne veut pas te perdre à peine retrouvée. ;-)

24/9/05 2:31 AM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Anitta, tu es grande grande grande.

Je suis contente de ton retour, et je viendrais bien plus souvent maintenant.

Car comme le chantait John (Lennon) "you don't know what you got, until you loose it".

;)

24/9/05 11:35 AM  
Anonymous Anonyme a écrit...

si le commissaire (oui ouije vois bien le genre) songe deja à mettre des bouchons d'oreilles...crois moi, icic on ouvre grand les mirettes et fait fortmeent usage du conton tige histoire de ne pas louper une miette. bon j'avoue parfois, je me fais des séances de rattrapage, mais je ne sais pas si ce n'est pas encore meilleur le "anitta's overdose"!
Le ciel était beau la nuit derniere
cele ci s'annoce encore plus jolie...

24/9/05 8:31 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Je me demande si tu ne pourrais pas ouvrir un p'tit Forum en annexe de ce blog où on viendraiot papoter !

(J'ai beaucoup aimé le billet... trop à dire ou pas assez ou pas maintenant...)

24/9/05 9:57 PM  
Blogger Ally a écrit...

C'est quoi ce bordel ?! "A suivre..." ?! Nan mais t'en as trop dit là ! alors la suite, et qu'ça saute ! S'pèce de criminelle va ! ;o)

25/9/05 8:34 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

gnnnnn ça vient?

26/9/05 9:55 AM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Un mélange entre Columbo et Derrick ?
Mais c'est Maigret !
Il t'a offert une bière ?

26/9/05 12:47 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

pfffff y'a qu'un commissaire qui soit regardable c'est Siska (ou alors Wolf mais il passe plus en ce moment et tfasson il passe hach'ment-super-tard alors qu'on bosse le lendemain, pas bien ça msieur)

ceci dit ... heuuu ... le forum c'est pas une mauvaise idée hein !!!

bizzzzatoi

26/9/05 1:12 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

Sais tu que je t'en voudrais à mort si tu ne me dédicaces pas ton premier ouvrage !

27/9/05 1:52 PM  

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