Ma chanson leur a pas plu.
– Bonsoir ! proféra Stéphane Bern. Bienvenue à Huit heures douze tapantes ! Aujourd'hui je reçois Anitta, une chanteuse sur laquelle reposent les espoirs de notre pays ! A la tête de Transparence, son groupe, elle représentera la France au Grand Prix de l'Eurovision. Je vous rappelle que depuis 1979 et Marie Myriam, notre pays n'a plus jamais gagné ce Grand Prix !
– Bonsoir Stéphane, j'ai répondu. Et merci de m'avoir invitée !
– Ça va, Anitta ? enchaîna le Fou du Roi. Il faut dire que depuis votre désignation, vous subissez une pluie de critiques…
– La pluie, j'ai l'habitude, j'ai dit. Mais là... Heureusement que les journaux et les chaînes de télé me soutiennent !
– On a beaucoup mis en cause les modalités de votre désignation. Par exemple, on prétend que vous n'avez pas été choisie de façon très démocratique.
– Les gens sont de mauvaise foi, j'en reviens pas, j'ai fait. Tout ça parce que c'est France Danhow, la productrice du show, pardon : de l'émission, qui m'a choisie personnellement…
– France Danhow, qui possède une résidence secondaire juste à côté de chez vous, intervint Muriel Cousin.
– Un parfait hasard ! protestai-je. C'est pas de ma faute !
– C'est pas un peu ringard, l'Eurovision ? poursuivit Muriel C.
– Non, pas du tout ! j'ai dit. C'est une belle et noble idée. La France doit beaucoup à l'Eurovision. L'Eurovision, c'est le futur de notre pays ! Moi je suis fière d'être une Eurovisionnaire ! L'Eurovision, c'est une des plus belles idées depuis l'invention du bonheur ! Vive l'Eurovision ! Répétez après moi : vive l'Eurovision !
– Ça va, on a compris, soupira Muriel. Et où en sont vos relations avec Amy Lee, la chanteuse d'Evanescence ?
Je me suis renfrognée sur mon siège.
– Oh elle ? Je lui cause plus. Soi-disant qu'on devait enregistrer un duo ensemble... Pfff ! J'attends toujours !
– Et que répondez-vous à ceux qui insinuent que vous avez tout copié sur elle ?
– Excusez-moi Muriel, l'interrompit Ariel Wizman. Moi je voulais dire que j'aime beaucoup la façon dont vous vous habillez, Anitta. En particulier, votre chemise de nuit est très jolie…
– Merci, c'est gentil. Je l'ai faite faire en Chine, sur mesure, le tout pour deux euros ! Une affaire, je vous dis que ça…
– Et votre maquillage de scène, vous l'achetez aussi au kilo ?
– Hi hi hi, fis-je. Très drôle !
– Anitta, présentez-nous les musiciens de votre groupe…
– Oh, ils sont fantastiques, vous savez. Alors, Transparence c'est Jean-Luc et Jean-Mi à la guitare, Stéphane à la basse, Thierry aux percussions et, euh... d'habitude il y a Franck à la batterie. Mais comme il est d'astreinte aujourd'hui, on a engagé Piotr pour le remplacer !
– Piotr ?
– Oui, un gentil garçon qui nous dépanne de temps en temps… Il vient de Varsovie, où il était le batteur du groupe Plonbyë. Mais je vous rassure : on l'a pris à l'essai vingt-quatre mois seulement !
– Venons-en à votre chanson, qui représentera bientôt notre pays, continua Stéphane Bern. Comment s'appelle-t-elle, déjà ?
– Traitez-moi de constitution. Je suis assez fière de ce titre.
– Le premier reproche qu'on vous adresse, c'est que votre texte n'est pas très compréhensible…
– Ah ben je vous remercie, vous ! Dites carrément que j'écris mal !
– C'est long, il y a des mots compliqués, on comprend pas tout…
– Ecoutez. Quand j'écris une chanson, je table sur l'intelligence de mes auditeurs. Alors si vous ne comprenez rien, c'est que vous n'êtes pas intelligent, c'est tout !
– Surtout, on prétend que vous n'en êtes pas l'auteure…
– Calomnie ! j'ai crié. C'est tout de même incroyable !
– Et que vous avez été aidée par un autre accordéoniste…
– C'est complètement faux ! J'écris mes chansons toute seule !
– Tout de même, il y a ce troisième couplet… s'inquiéta Stéphane.
– Quoi, lequel ?
– Celui dans lequel vous dites : "Moi j'aime la concurrence quand elle n'est pas faussée / Aussi permettez-moi cette libéralité / C'est vrai, on peut s'en faire beaucoup du fric / En privatisant tous les services publics". C'est pas un peu violent, comme charge ?
– C'est du rock'n'roll, j'ai répondu. Normal que ça vous choque !
– On raconte aussi que changer les paroles de votre chanson est quasiment impossible, il y a une procédure très compliquée…
– Non, pas plus que ça ! Simplement, il faut trouver un studio, que le producteur soit libre, que les musiciens soient disponibles, que la maison de disques donne son accord, que l'usine allège son carnet de commandes, que les transporteurs routiers trouvent des camions, et que la grande distribution débarrasse ses étalages ! Et enfin, que les consommateurs aient mis un peu d'argent de côté… Vous voyez, c'est très simple, en fait !
– Oui, effectivement, convint Stéphane Bern. Mais, sans vous fâcher, vous répondez quoi à ceux qui disent préférer la face B ?
– Quoi ? Mais il n'y a pas de face B voyons ! C'est un CD !
– Vous êtes sûre ? Pourtant, si on en croit certains échos…
– Ah mais ! Moi je vous assure qu'il n'y a pas de face B !
– Alors, pourquoi les jurés de l'Eurovision devront-ils voter pour vous dimanche prochain ?
– Ah je suis désolée, la question c'est plutôt : comment peuvent-ils ne pas voter pour moi ? Faudrait vraiment être un abruti pour pas comprendre qu'ils n'ont pas le choix !
– Une dernière critique, Anitta, et ensuite nous écouterons votre chanson. Pourquoi allez-vous jouer cette chanson à Istanbul ? Il n'y avait pas de salle libre, à Paris ?
– Mais c'est vraiment n'importe quoi, ce que vous dites ! C'est là-bas qu'il a lieu, le Grand Prix de l'Eurovision !
– C'est une délocalisation sauvage, d'après ce qu'affirment Arlette et Olivier…
– Ça, ça m'étonnerait ! Arlette Chabot et Olivier Mazerolle, je les connais bien ! Ce sont des amis. D'ailleurs, ils viennent manger les moules-frites chez moi dimanche !
– Non, je… Je parlais d'Arlette Laguiller et d'Olivier Besancenot !
– Jamais entendu parler, j'ai dit. Ils jouent dans quel groupe ?
– Excusez-moi Stéphane, intervint Ariel Wizman. Si je comprends bien Anitta, vous êtes très confiante pour dimanche ?
– Bien sûr ! Croyez-le, on va le gagner, ce Grand Prix ! Comme dit mon fournisseur chinois, on va tous les battre à plate couture !
A cet instant, un ressort a grincé, et :
– NON, NON, NON, ET NON ! j'ai dit.
– Ecoute, a fait mon mari en allumant sa lampe de chevet. Depuis quinze jours que le référendum est passé, on pourrait peut-être essayer de dormir un peu plus tranquillement, maintenant ? Non ?
– Heu ben euh... j'ai bafouillé, avant de me rendormir.
(photos X)…
14 PETIT(S) COMPRIMÉ(S):
waaaaaaaaaahn !
Magnifique, Anitta ! Bravo et merci.
Heureusement qu'il y a des eurovisionnaires comme toi.
hihi
génial !
Héhéhé... joli !
Anitta, certaines se posent des questions quant à leurs pensées, moi de plus en plus je me demande comment c'est fait à l'intérieur chez toi. Il y a de quoi s'y perdre et pas forcément une envie de s'y retrouver. Je me laisse entraîner.
ça fait du bien de te lire en fin de journée (en début aussi, mais ce n'est pas le propos)
Mais je savais que c'était du bidon, car dans le récit, tu dis:
-Calomnie ! j'ai crié.
Or, si tu étais une vraie chanteuse, tu aurais crié Aline, pour qu'elle revienne.
Et toc !
Ah si, trop drôle !!!
Quand la réalité dépasse la fiction,
Quand nos croyance ne sont plus qu'illusions,
Il est amusant et bon,
de rire de ces fanfarons.
Cordialement
mouahahahahahahahaha
Huhu.
Dommage que j'aie fait le voeu de ne pas parler du TCE sur Internet, sinon j'aurais pu dire que ce texte m'a fait hurler de rire.
Et l'air ça donne quoi ?
Je n'ai pas hurlé de rire (je suis au bureau et pas la seule dans ledit bureau et les autres y font rien qu'à dormir...)
Mais c'ets tout comme !
J'adore. Je suis fan :-)
bonjour! je voulais juste dire ca.
je n'oblige personne à changer mes coordonnées anitta
je vois ce qui est le mieux pour moi et qui m'aime me suive
le reste aprés ...
si je dois aussi me prendre la tête sur le quand dira t'on des bloggeurs je suis pas couchée !
bizzzzz
Excellent !
N'en parlons plus !
Bravo!!!
Soyons tous Eurovisionnaires!!!
<< Home